Plantes envahissantes

"Piège à poisson XI" en bambou pour Loewe @Cheng Tsung Feng

Plantes envahissantes

Plantes envahissantes

Champignonchanvrecuir végétal… Les créatifs continuent de puiser dans la nature pour façonner un design plus responsable. Ils s’intéressent particulièrement au bambou et aux plantes envahissantes originaires d’Asie. Notamment à la Renouée du Japon, véritable peste végétale. Sous leurs mains, cette ressource invasive et non sollicitée se transforme en denrée hyper désirable. Comme le bambou, elle est aussi résistante que polyvalente, et elle permet de façonner des ouvrages à la fois hautement esthétiques et délicats. Démonstration.

" Péraciné " par Samy Rio et l'atelier Luma Arles @Joana Luz, Victor Picon, Samy Rio

LE DESIGN RENOUE AVEC LA RENOUÉE DU JAPON

 

 

Originaire d’Asie, la Renouée du Japon est une herbacée très vigoureuse, elle colonise les espaces riches en métaux : pentes volcaniques, monticules de cendres issues des centrales thermiques à charbon… Elle représente à ce titre un danger pour l’environnement en France, et est systématiquement détruite pour préserver l’écosystème. 

Le Club des Plantes Invasives et l’Atelier LUMA collaborent pour récupérer et valoriser les plants arrachés. Le designer industriel Samy Rio participe à ce projet de transformation. Il étudie comment cette herbe saisonnière change de propriété selon la période de récolte pour créer des petits objets de décoration, ou du mobilier alvéolaire solide. Il en parle avec Hélène Aguilar dans le dernier épisode du podcast Où est le beau ?

34 NUANCES DE RENOUÉE

 

 

Les feuilles de la Renouée du Japon sont aussi utilisées par la designer brésilienne/italienne Marina Belintani pour créer des teintures. Elle arrive à extraire de la plante 34 nuances différentes qui oscillent entre le noir et le rouge vif en passant par le kaki et le crème. Outre les colorants, elle transforme aussi la plante en supports textiles et industriels variés : fibre tissée, dentelle fine, couvercle en verre, feuille de bioplastique… 

La designer Brigitte Kock et l’architecte Irene Roca Moracia font aussi des merveilles avec les plantes envahissantes. Au Royaume-Uni, la renouée du Japon et les coquilles d’écrevisses américaines font l’objet d’une éradication massive. Les chercheuses ont donc fusionné ces deux ressources négatives en une ressource positive : un bio-béton poreux aux teintes terreuses. Ce projet a été commandé par le programme Maison/0 qui vise à développer une alternative durable aux matériaux de construction actuels pour les magasins de luxe du groupe LVMH.

Teintures naturelles à base de renouée du Japon © Marina Belintani
Mobilier i - a, tissage de ramie, joncs, rotin, bambou laminé et écorce © Liang Jung

LE BAMBOU TISSE SA TOILE DANS LE DESIGN…

 

 

Moins envahissant mais tout aussi polyvalent, le bambou pousse également dans les matériauthèques des designers. Comme le chanvre, sa production est rapide et il nécessite peu d’eau. Concernant son travail, il se décline largement : tissé, tressé, plié, sculpté, laminé… Les designers aiment aussi l’assembler à d’autres matériaux.

La designer taïwanaise Liang Jung basée à Londres a créé avec 7 artisans de son pays une chaise qui fusionne six savoir-faire et matériaux locaux : le tissage de ramie, de joncs, de papier, de rotin, d’écorce et le laminage de bambou. Le tout dans une esthétique raffinée-sophistiquée.

Il y a aussi l’artiste japonais Shigeo Mashiro, fondateur du studio SFERA qui entremêle le bambou minutieusement tressé et découpé et de la porcelaine fine dans son projet Air vessel 52.

… ET DANS L’ARCHITECTURE

 

 

La force de compression du béton, le rapport résistance-poids de l’acier… Flexible, imperméable, extrêmement résistant, le bambou est très sollicité dans l’architecture. Il représente une alternative naturelle et tout aussi performante aux éléments de construction traditionnels.

Il démontre ses prouesses dans la jungle balinaise, sur le gymnase The Arc imaginé par le studio d’architecture Ibuku pour une école privée qui promeut la durabilité par l’apprentissage dans un environnement naturel. Le toit à double courbure entièrement réalisé en bambou abrite une surface au sol de 760 mètres carrés.

À Taïwan, la Fish Trap House imaginée par l’artiste Cheng-Tsung Feng s’étend comme un piège à poisson au-dessus du lac Sun Moon à Nantou. Une architecture tout en finesse et délicatesse qui rend hommage à la sagesse et à l’artisanat indigène.

"Piège à poissons VI" en bambou © Cheng Tsung FENG